La Ville industrielle a accouché de L’homme à la caméra dans les usines Lumière puis, sans ménagement,
elle l’a jeté avec armes et bagages à la rencontre de ses gares, de ses rues et de ses habitants.
Depuis, tout cinéaste a au fond de soi la Ville qui sommeille. Parfois sa présence devient si forte qu’elle se fait tout entière Ville de cinéma, fantôme de la ville réelle qui, l’enveloppant dans la fiction, en fait surgir
l’inimaginable vérité : tandis que Berlin se drappe dans les ombres et lumières de Fritz Lang ou de Wim Wenders, Tokyo se fond pour l’éternité dans les images d’Ozu, Paris
adopte les traits de Marcel Carné, Eric Rohmer ou Jean-Luc Godard, Lisbonne devient
ville de Manuel de Oliveira, Vienne ville de Max Ophüls, Rome ville de Rossellini, Pasolini, Scola ou Moretti, Jérusalem ville d’Amos Gitaï, Hong Kong ville de Wong Kar Wai, Shanghaï ville de Jia Zhang ke... Que serait New York sans les regards contrastés de ses grands cinéastes-conteurs : Woody Allen, John Cassavetes, Spike Lee, Martin Scorsese, Abel Ferrara, Jim Jarmusch, Amos Kollek, sans les images de ses cinéastes-
nomades : Chantal Akerman, Youssef Chahine, Raphaël Nadjari, Agnès Varda... ? sans celles des cinéastes-chasseurs fous de réel, en quête d’un « butin de caméra » lourd du poids des choses et des êtres : Jonas
Mekas, Shirley Clarke, Lionel Rogosin, Jean-Louis Comolli, Raymond Depardon...
Comment imaginer les villes réelles sans convoquer aussitôt les villes imaginaires, les incroyables villes de cinéma « tissées de l’étoffe des songes » : Metropolis, L’Atlantide,
Alphaville..., sans faire le détour par les villes rêvées peuplées de monstres et de catastrophes prémonitoires ? Que seraient Berlin sans M. le maudit, Londres sans Dr Jekyll et Mr Hyde, New York déserté
par King Kong ou Spiderman ? Qui peut encore
voir Los Angeles sans faire surgir son double diabolique, la ville-cauchemar des cyborgs de Blade Runner ou la ville-cerveau de Mullholand Drive ? Loin des lumières aveuglantes des villes-icônes,
ce seront encore toutes les petites cités où il ne se passe rien ou pas grand’chose jetés
dans la lumière l’instant d’un film avec les innombrables et sordides événements qui grouillent sous leur apparente banalité. Et puis les villes-délires des grands rêves utopistes,
les villes-champignons et les villes-fantômes des westerns, les espaces-temps chaotiques et les non-lieux des mégapoles contemporaines... Partout, visible ou non, la Ville hante le Cinéma, partout le Cinéma pense et fait la Ville.
Traquant la présence puissante, polymorphe de l‘Urbain dans l’imaginaire contemporain, pôle audiovisuel majeur de la Biennale de la Ville de Saint-Etienne qui célébrera joyeusement
les transes urbaines des arts et des cultures, CINEMAVILLE convie tous les publics à s’embarquer, entre réel et imaginaire, pour les mille « pays supplémentaires » nés des folles amours du Cinéma et de l’Urbanité, seconde nature de l’homme moderne peuplée
d’inquiétantes et fascinantes beautés.
Alain Renaud
AXES DE LA PROGRAMMATION :
NEW YORK DELIRES
carte blanche à Richard Peña, directeur du NY Film FestivalLincoln Center
LA CHINE EST PROCHE
carte blanche à Jia Zhang-ke, cinéaste
programmation par Jean-Michel Frodon
TRANSEUROPEXPRESS
carte blanche à Francis Bueb, directeur du Centre André Malraux, Sarajevo
ERRANCES Des Regards, des Auteurs et des Villes
VIOLENCES La Ville et ses Bandes
RESISTANCES Cinémas, Villes en Mode Mineur
FONDATIONS Cinémas, Mémoires de Villes
Des projections, des rencontres, des débats, des animations, dans la ville, au coeur du cinéma.
Vendredi 10 juin 2005, grande soirée place de l’Hôtel de Ville, consacrée à un chef-d’oeuvre du cinéma des origines.
Projection 35mm en copie neuve sur écran géant de La Nouvelle Babylone (1929) de Grigori Kozintsev et Léonid Trauberg, avec accompagnement orchestral selon la partition
originale de Dimitri Chostakovitch.
BIENNALE DE LA VILLE, LES TRANSURBAINES
Jean-François Millier
directeur artistique
bureau ADCEP
biennale de la ville
Office de Tourisme
16, avenue de la Libération
42000 Saint-Etienne
tel +33(0)4 77 43 31 90
fax +33(0)4 77 41 94 52
CONSEIL ARTISTIQUE
François Barré
ancien président du Centre Georges Pompidou,
ancien directeur de l’Architecture et du Patrimoine au ministère de la culture,
conseiller Projets Culturels et Urbains
Jean-Michel Frodon
directeur de la rédaction des Cahiers du Cinéma,
responsable de L’Exception.
L’Exception, groupe de réflexion sur le cinéma
Thierry Frémaux
directeur de L’Institut Lumière